Prologue.
On dit que les ennuis commencent dès que l’on coupe le cordon ombilical.
Tu vois le jour en ce froid matin d’hiver, et ouvre tes yeux noisette pour découvrir le monde pour la toute première fois. Aussitôt le froid te tiraille, et tu étouffes, incapable de pousser le cri tant attendu. Aussitôt, on s’active autour de toi, on t’enroule dans une couverture pour te réchauffer et on appuie sur ta petite poitrine pour te faire respirer. Tu finis par ouvrir grand la bouche, et enfin, ta petite voix raisonne dans la pièce. On te donne à ta mère, tu te pelotonnes contre elle et entame ton premier repas, tandis qu’elle murmure doucement.
- Avec un départ pareil, tu ne pourras qu’avoir une vie pleine de chance.
Tu ne te doutes malheureusement pas qu’elle t’a menti, alors qu’elle observe sur ton omoplate, la marque redoutée d’une aile déployée. Seul l’avenir te dira si tu es digne de la garder, ou non.
Acte I
Enfant, tu es le trésor de tes parents. Ils n’ont d’yeux que pour toi, te gâtent, te chérissent. Etant fille unique, tu es le seul amour de leur vie. Ils parlent de toi à tout le monde et malgré leur niveau de vie modeste mais acceptable, te traitent comme une vraie petite Princesse et te couvrent d’amour. Dommage, tu n’as pas suffit à ton père.
Alors que tu joues dans ta chambre, à quelques jours de Noël, tu entends soudainement de la vaisselle se briser. Tu sors alors, et depuis l’encadrement de ta porte, tu surprends une conversation de tes parents. Bien que tu n’en comprennes pas tout à fait le sens, du haut de tes onze ans, les paroles de ta mère te resteront en tête toute ta vie.
- Tu n’étais sensé n’avoir que deux femmes dans ta vie, moi et Miyo. Avec une de plus, ça fait un peu trop de monde.
Tu ne sais pas qui est cette troisième femme dont parle ta mère, mais ce que tu sais, c’est qu’à partir de cet instant, ton père est parti, et tu ne l’as plus jamais revu. Ce Noël fut le plus glacial que tu n’es jamais vécu, seule. La solitude te gagne, la malchance aussi, peu à peu. Et tu comprends que ta mère t’a menti le jour de ta naissance. Tu comprends que tu ne seras pas aussi chanceuse que ce qu’elle t’avait promit, et que ta vie ne sera pas des plus simple.
Acte II
Avec le temps, tu finis par accepter d’être ce que tu es. Pour la simple et bonne raison qu’en voyant ta mère se morfondre sur son sort, tu finis par être dégoutée de la plainte, et c’est déterminée à accepter ta vie comme le destin l’a tracée pour toi, que tu te relèves, et que tu t’éveilles. Sur ton omoplate, ta marque s’illumine un bref instant, alors que tu n’as que quinze ans. Tu es même plutôt fière. Tu as été choisie par les Cieux pour être l’une de ses filles. Pourtant tu sais pertinemment que ça ne suffira pas à consoler ta mère, ni à revoir ton père. Alors tu ne fais qu’accepter, et continues de vivre avec.
Tu quittes l’école à seize ans, âge où tu as le droit de le faire, pour commencer à travailler dans un café. Là, tu y vois souvent une jeune fille, à la chevelure violine, le nez toujours fourré dans ses bouquins. Comme elle est habituée du lieu, tu commences à discuter avec elle, et apprend son nom ; Merui Sohma. Une nouvelle amie, peut-être ? Elle t’explique qu’elle a aussi une marque, mais que la sienne est brisée. Une réprouvée. Qu’importe, te dis-tu, elle reste celle qu’elle est.
- Tu sais, j’ai un frère jumeau, Minato. Mais du jour au lendemain, il est parti. Puis je l’ai revu à la perte de ma marque, j’ai appris qu’il était parti à cause de la perte de la sienne. Il n’est revenu que pour me dire de faire attention aux Erudits.
Peinée, tu écoutes cette histoire avec compassion. Minato… Si seulement tu avais su, que ce nom resterait à jamais gravé dans ta mémoire… Et dans ton cœur.
Acte III
Merui ne vient plus au café depuis quelques semaines. Tu as cru comprendre qu’elle passait un examen, ou quelque chose comme ça. Sa présence te manque, mais tu n’as aucun moyen de la joindre, tu n’as ni son adresse ni son numéro, et tu comprends bien vite que vous n’êtes peut-être pas si amies que ça. Alors que tu lâches un long soupire, la clochette teinte, signalant l’entrée d’un client. Tu te tournes donc vers lui, et le salue en s’inclinant.
- Bienvenue.
C’est un jeune homme, plus âgé que toi. Il te fixe longuement, retire sa capuche pour te laisser analyser son visage, qui te semble d’ailleurs bien trop beau pour être vrai. Ses cheveux noirs-violine te rappellent étrangement ceux de Merui. Il te tend d’ailleurs une photo de celle-ci, et te demande si tu la connais. Abasourdie, tu approuves.
- Merui ? Bien sur que je la connais.
Alors qu’il cherche à en savoir plus, tu lui apprends tout ce que tu sais sur elle et découvre avec stupeur qu’il s’agit de Minato, le frère dont elle t’a parlé. Et qu’il cherche des informations sur sa sœur que tu sembles être la seule à détenir compte tenu de l’asociabilité totale de la demoiselle. Alors tu prends la décision de lâcher ton boulot, pour l’aider dans ses recherches. Te voilà donc informatrice à ton tour, autoproclamée binôme du garçon âgé de trois ans de plus que toi.
Acte IV
Un mois déjà que tu suis Minato partout où il va pour apprendre les ficelles du métier d’informatrice. Bien qu’il n’était pas tellement pour au début, il a finit par t’accepter, pour ta plus grands joie. Tu l’apprécies beaucoup, et le fait qu’il ne te juge pas sur le fait que tu sois Enfant des Cieux et lui Réprouvé t’enchante. Vous êtes en mission d’infiltration ce jour là. Alors que vous espionnez des Erudits avec la plus grande discrétion du monde, tu entends soudain des coups de feu. Paniquée, tu te retournes et remarque des tireurs, dans la rue d’en face.
- Minato, on est repérés !
Il plaque sa main sur ta bouche et t’entraine plus loin. Tu cours. Tes jambes ne te suivent pas, mais tu cours, jusqu’à être hors d’haleine, tout en tachant de ne pas le perdre des yeux. Mais une vive douleur te travers la jambe, et tu chute en criant. Il s’arrête et se retourne. Le tireur qui a eu ton mollet arrive à toute allure et s’apprête à te finir.
Mais Minato lui règle son compte, puis te soulève dans ses bras pour t’emmener à l’hôpital le plus proche afin de te faire soigner. Il t’a sauvée. Tu ne saurais exprimer combien tu es heureuse dans ses bras, combien tu voudrais ne jamais les quitter. A ce moment, tu te promets qu’un jour, ce sera toi qui le sauvera. Il est devenu ton héros, l’homme de ta vie.
Epilogue
Depuis deux ans maintenant, tu es devenue une informatrice hors paire. En véritable ninja, tu te fonds dans la masse, récolte toutes les informations que tu veux avec un simple sourire. Tu t’es rapproché de ton binôme pour qu’il devienne au final, ton premier vrai ami. Seule tâche noire à ton tableau ; tu as développé envers lui des sentiments bien plus forts que ce qu’il devrait être, et son prénom commence doucement à se graver en lettres d’or sur ton petit cœur de jeune femme, et n’est pas près d’être effacé. Mais ça, c’est un secret que tu te dois de garder.